
AT&T, a surpris son monde en annonçant son désinvestissement sur WarnerMedia, anciennement Time Warner achetée en octobre 2016 pour 85 Md$. L’opérateur télécom américain va scinder sa filiale médias-divertissements et la fusionne avec le groupe de chaînes thématiques, Discovery. Cette opération donnerait naissance à un géant dans le domaine du divertissement et des médias. WarnerMedia et Discovery uniraient leurs forces dans le streaming pour concurrencer Disney+, Netflix, Prime Video, etc.
Les marchés financiers avait bien réagi dès les premières heures après l’annonce de cette opération. Mais lorsqu’ils ont pris connaissance des détails, c’était la douche froide. L’action AT&T s’est brusquement retournée à la baisse, car le dividende allait baisser suite à la fusion-acquisition entre WarnerMedia et Discovery.
Cette réduction drastique du dividende ne fait pas plaisir aux investisseurs particuliers. En consultant divers blogs américains, canadiens et européens spécialisés sur les dividendes, les avis sont partagés. Plutôt de réagir à chaud, j’ai pris le temps de la réflexion pour analyser les avantages et les inconvénients de l’opération. AT&T a été longtemps l’un des baromètres des actions à haut rendement. Cela sera moins après l’opération. La bonne question à se poser est : faut-il vendre ou conserver AT&T ?
Un recentrage stratégique d’AT&T et un nouveau acteur des médias et des divertissements
Cette opération de fusion-acquisition rassemblerait plusieurs marques. Chez WarnerMedia, il y a HBO Max, WB, DC, TNT, TBS, CNN, Boomerang, Cartoon Network, etc. Du côté de Discovery, ce sont les chaînes thématiques qui font sa marque de fabrique telles que Food Network, HGTV, Eurosport, Cooking Channel, History, etc. Cela nous donnerait une palette de contenus très diversifiée.
Si l’étape des autorités de concurrence devait être franchie avec succès, les actionnaires d’AT&T posséderont 71 % des parts du nouveau acteur des médias-divertissements tandis que ceux de Discovery en auront 29 %.
Cette opération va permettre à AT&T de recevoir 43 Md$ répartis en cash, en titres de créances, et en rétention de certaines dettes de WarnerMedia et de réduire son niveau d’endettement. La naissance de WarnerMedia-Discovery devrait être finalisée vers la mi-2022. En conséquence, AT&T va à présent se concentrer sur ses activités d’origine, la télécommunication avec comme moteur de croissance, la 5G et la fibre optique.
Baisse du dividende d’AT&T en perspective
Le fait que le dividende d’AT&T baisserait suite à l’opération, a enflammé la toile. J’ai moi-même constaté que des blogueurs américains et européens très à cheval sur les dividendes avaient décidé de vendre tous leurs titres par peur de voir le couteau tomber profondément. À titre personnel, j’ai préféré adopter une position neutre en attendant les détails de l’opération. Et à l’heure où j’écris cet article, c’est encore le silence radio qui prédomine. Ce silence radio du management d’AT&T laisse planer des incertitudes.
AT&T vise un free cash flow (FCF) de 20 Md$ avec un ratio de distribution basé sur le FCF autour de 40-43 %. Alors qu’il tourne actuellement autour de 60 %, il devient clair que les actionnaires vont avoir moins de dividendes après l’opération.
Actuellement, AT&T consacre 15 Md$ de son FCF pour le dividende. La fusion entre WarnerMedia et Discovery le réduirait de 47 %. Le dividende d’AT&T passerait donc de 2,08 à 1,10/1,11 $ par action. Ce qui constituerait un vrai trou d’air pour vos revenus futurs.
Notre lot de consolation dans cette opération serait de recevoir de nouvelles actions. Mais est-ce que la nouvelle entité va distribuer ou non un dividende ? D’où l’intérêt d’étudier les différentes options qui se présentent.
Quelles options prendre sur AT&T ?
Option n°1. Vous décidez de vendre tous vos titres. Vous pensez que l’herbe sera plus verte au lieu de subir les incertitudes qu’engendrent cette opération de fusion-acquisition. Pourquoi pas redéployer ce cash sur son rival Verizon ou les opérateurs télécoms canadiens comme Telus et BCE (à ne pas confondre avec la Banque Centrale Européenne) qui possèdent un excellent historique d’années consécutives de leur dividende.
Option n°2. Vous réduisez votre position. Ce qui ressemble à une cession partielle. Le cash récupéré sera peut être alloué sur les concurrents télécoms cités précédemment ou vers d’autres industries moins sensibles à une baisse de dividende : agroalimentaire, défense, produits d’hygiène et ménagers.
Options n°3. Vous conservez tous vos titres sans exception. Si la nouvelle entité composée de WarnerMedia et de Discovery ne propose pas de verser un dividende, vous revendez les nouveaux titres dès les premières minutes de cotation. Et à ce jeu, il se pourrait que vous récupéreriez une partie du manque à gagner liée à la baisse du dividende d’AT&T sur une année. Voir complètement si les conditions de marchés seraient favorables.
Options n°4. Vous conservez tous vos titres sans exception. Si la nouvelle entité composée de WarnerMedia et de Discovery propose de verser un dividende à la surprise générale, la réflexion pourrait s’imposer avec une calculatrice à la main. Mais des quatre options, elle semble improbable selon les analystes financiers.
Options n°5. Si vous possédez au moins 100 titres d »AT&T, pourquoi pas capitaliser sur des covered call (vente de call couvert par 100 titres détenus) afin de générer des revenus qui compenseront vos moins-values actuelles.
En résumé
Entre les lignes, cette cession de WarnerMedia est un aveu d’échec, car les synergies entre la télécommunication et le contenu n’ont eu pas les effets escomptés alors que sur le papier, c’était une opération pertinente. Mais force est de constater que l’opérateur télécom américain ne peut pas courir deux lièvres à la fois. En voulant mettre le paquet sur la 5G et la fibre, il préfère revenir aux sources.
À court terme, la destruction de valeur pour l’actionnaire ne fait pas l’ombre d’un doute. Mais avec le temps de la réflexion, cette nouveau virage stratégique peut s’avérer porteur et amènerait plus de visibilité vis-à-vis des marchés. Le poids de l’endettement serait un lointain souvenir.
Les actionnaires d’AT&T pourraient se satisfaire d’actions gratuites de la nouvelle entité entre WarnerMedia et Discovery. L’idée de les réallouer vers d’autres actions ferait tranquillement son chemin, si cette dernière ne propose pas de dividende. Valoriser et monétiser le contenu nécessite régulièrement des investissements pour attirer de nouveaux abonnés. Cette forte intensité capitalistique empêcherait une génération récurrente du cash flow.
En somme, AT&T perdrait son statut d’aristocrate à dividende, c’est-à-dire des entreprises américaines qui ont augmenté leur dividende pendant au moins 25 années consécutives.

Sovanna SEK est un investisseur de long terme passionné par la Bourse avec pour modèle, Warren Buffett. Il vous donne des conseils pratiques pour construire et gérer un portefeuille boursier rentable sur le long terme.
Sa philosophie d’investissement possède un côté pile ou face. Pile, il investit sur des actions de belle qualité à des prix raisonnables. Face, il est un défenseur de l’or pour se protéger contre l’inflation 2.0.