Le guide Attention Danger investir sur le secteur bancaire : 5 raisons de rester à l’écart à long terme

Attention danger investir secteur bancaire

Avouons-le ! Investir sur le secteur bancaire ne fait pas rêver en Bourse.

Avec les casseroles qu’il traîne depuis la crise des subprimes aux États-Unis, cela s’avère du suicide. Curieusement, ce sont les banques européennes qui peinent à se relever et non les banques américaines. Il faut dire que les banques américaines ont eu l’appui immédiat de la FED. Cette dernière a racheté leurs créances douteuses alors que la BCE a traîné des pieds à cause du manque de solidarité entre les pays de l’Union Européenne.

Concrètement, on ne sait pas ce qu’il y a dans leur bilan. Leur transparence sur leur solvabilité financière est mise en doute. Les médias, les économistes et les professionnels de la finance prétendent le contraire avec les gardes-fous des banques centrales. Ils vont font croire que les choses vont rentrer dans l’ordre. Sur le terrain, je suis convaincu que ce n’est pas si rose qu’il en a air. La vraie opinion publique reste sur leurs gardes.

Pour éclairer votre lanterne, voici ce qui cloche sur le secteur bancaire. Attention Danger ! Ce que je vous dis ne vous fera pas plaisir voir vous heurter votre sensibilité.

 

Raison n°1 : Un business model incompréhensible et attaqué pour de bonnes raisons

La première raison qui doit vous inciter à être prudent sur un investissement à l’achat sur les actions bancaires est leur manque de visibilité sur leur business model. Le secteur bancaire est complexe à comprendre pour l’investisseur parce qu’il rassemble plusieurs segments d’activité : banque de détail, banque de financement et d’investissement, gestion d’actifs, gestion back office, opérations bancaires, etc.

Pour chacun, il y a trop d’intermédiaires avec des produits et services peu compétitifs pour répondre aux exigences de la satisfaction client. Les habitudes des consommateurs ont également changé. En effet, ils viennent de moins en moins dans les agences bancaires qui deviennent petit à petit un poids financier plutôt qu’un avantage concurrentiel, consultent régulièrement leur compte sur Internet et savent que leurs conseillers ne sont pas les mieux placés pour donner des conseils patrimoniaux pointus.

La réalité est que le secteur bancaire est bien dans une spirale déflationniste avec une surcapacité dans certains segments d’activité (banque de détail en particulier). Pour affronter la vague de la transformation digitale qui est en quelque sorte une innovation de rupture, il y a du pain sur la planche. Les fintechs sont potentiellement plus aptes pour répondre à cette tendance de fond. Elles utilisent la technologie sur un service existant dans le monde bancaire en apportant un bénéfice supérieur aux clients à un coût peu élevé. Ce qui est salutaire à moyen-long terme, c’est que ses nouveaux acteurs s’incrustent sur l’ensemble des métiers, en particulier dans le mode de paiement.

 

Raison n°2 : Faible rentabilité = Crainte sur leur business model

La seconde raison fondamentale pour ne pas investir sur le secteur bancaire est leur faible rentabilité par rapport aux capitaux propres après la crise de 2008.. Les banques mettent sur le compte de normes réglementaires alors qu’elles ont fait le travail nécessaire pour respecter les critères de Bâle 3.

En regardant de plus près, les banques ont peur de bouleverser leur business model parce que la transformation digitale est un concept de destruction créatrice et les coûts de restructuration sont importantes pour s’adapter à cette nouvelle donne industrielle. Il n’est pas étonnant de voir régulièrement des suppressions d’emplois.

Ratio rentabilité capitaux propres secteur bancaire

 

Malgré les bonnes intentions des banques françaises et américaines pour s’adapter à la transformation digitale, leurs ratios de rentabilité peinent à suivre et ne parviennent pas à renouer avec les niveaux d’avant-crise même si les temps ont bien changé. Le constat est qu’elles ne prennent pas des initiatives concrètes. À terme, on peut se demander où se trouve la création de valeur pour l’actionnaire. Sans chercher à jouer les oiseaux de mauvaise augure, je me fais beaucoup de soucis pour les particuliers qui possèdent des actions bancaires au nominatif ou au porteur.

Pour illustrer mes propos, j’ai eu la chance lors du salon Viva Technology à Paris en juin 2016, de discuter avec Nicolas Gonzalez, l’un des fondateurs Fundvisory qui a travaillé dans le passé dans une institution bancaire et à la BCE. Il m’a confié que la structure très hiérarchique du secteur bancaire empêche l’innovation en plus des liens très forts avec les banques centrales et les États.

 

Raison n°3 : Doute sur les ratios de solvabilité des banques

La plupart des PDG des grands établissements bancaires qu’elles soient européennes ou américaines, nous disent qu’ils ont fait le travail nécessaire en matière de solvabilité pour se conformer aux normes de Bâle 3. Ce qui vous doit vous rassurer.

La vérité est que les banques ont recours à une ingénierie financière, la pondération des actifs avec la liberté de faire leurs propres calculs avec des formules complexes dignes de Math Sup – Math Spé. Sans entrer dans des considérations techniques, elles sélectionnent les actifs qui représentent un risque plus ou moins important pour leur solvabilité puis mettent en face des capitaux nécessaires pour s’en prémunir.

Si une banque détient des actifs notés AAA, il y a de fortes chances qu’elle n’en mette pas. Le fait que les banques centrales jouent leur rôle de dernier ressort, ne les incitent pas à faire les efforts nécessaires pour améliorer leur situation en matière de solvabilité et elles rechignent à ne pas faire des augmentations de capital au risque de ne pas attirer des futurs investisseurs. Bref, la solvabilité des banques publiée officiellement sur les documents de référence reste artificielle et cela signifie que les leçons de 2008 n’ont pas été retenues.

Ratios de solvabilité du secteur bancaire

Si vous voulez mesurer la solvabilité réelle des banques, cela passe par un simple calcul élémentaire. Vous divisez leurs capitaux propres par leur total des actifs. Le moins qu’on puisse dire est que les banques européennes sont loin du compte. Quant aux banques américaines, elles ont l’impression d’avoir retenu les leçons de l’éclatement de la bulle des subprimes mais ont un problème de taille avec le rapatriement des pétrodollars qui me semble très sous-estimé par les marchés financiers.

L’inquiétante exposition des banques sur les produits dérivés

Exposition produits dérivés secteur bancaire

Malgré que les États et les banques centrales aient apporté leur aide en 2008, leur exposition sur les produits dérivés reste très préoccupante parce qu’elle dépasse pour la plupart d’entre elles, le montant du PIB de leur pays respectif. Pour les banques françaises, elle avoisine plus de deux fois le PIB de la France.

Le point commun des banques too big to fail est qu’elles sont très exposées sur le marché de taux. Si une hausse sensible se réalise dans un temps bref, cela risque d’être incontrôlable.

 

Raison n°4 : Le poids important du shadow banking

Peu cité dans les médias financiers, le shadow banking (système financier sans surveillance du circuit réglementaire) a connu une croissance fulgurante après la crise de 2008. Selon le dernier rapport du Conseil de Stabilité Financière, il pèse 90 % du système financier mondial dans 26 pays recensés. Les taux d’intérêt à zéro ont contribué à son essor et favorisé la spéculation à crédit sur des actifs financiers à haut risque. Les prêts qui sont octroyés à ce jour, ne proviennent pas du circuit bancaire mais des acteurs du shadow banking ou des activités hors bilan des banques qui échappent à l’usine à gaz réglementaire. Si ces derniers en profitent malgré les risques potentiels, c’est qu’ils empruntent bas pour prêter plus cher pour se faire une marge. Pas besoin d’un doctorat de finance pour comprendre leur jeu.

Poids du shadow banking

 

L’autre raison de la croissance rapide du shadow banking est le niveau d’exigence réglementaire dans les bilans des banques dont les actifs de bonne qualité sont acceptés comme collatéral et peuvent être incorporés dans les capitaux propres par la méthode de la pondérations des actifs. Ce qui les empêchent de se financer à court terme en échange d’un actif de faible ou moyenne qualité. Grâce à cette règle qui met en difficulté les banques, le shadow banking profite sans limite du marché du financement à court terme pour spéculer à tout-va à condition que les taux d’intérêt restent proches de zéro.

Pour enfoncer le clou sur l’opportunité d’investir sur les actions bancaires, leurs activités sont interconnectées directement ou indirectement avec celles du shadow banking. Leurs relations directes existent à travers les activités d’intermédiation du crédit qui sont des structures hors bilan fondées par les banques. Quant aux relations indirectes, elles se produisent quand des banques et des institutions financières non-bancaires investissent en même temps sur des actifs financiers similaires, ou bien possèdent des risques de contrepartie communs. Malheureusement, elles sont difficilement vérifiables dans les documents de référence mais faut-il s’étonner quand on parle de finance de l’ombre. Au niveau géographique, les États-Unis détiennent la plus grosse part de marché du shadow banking qui avoisine 82 % du PIB en 2014.

 

Raison n°5 : La carte bancaire bientôt obsolète dans les prochaines décennies ?

Pour rappel, le business model des banques repose sur trois activités : l’activité de détail, la gestion d’actifs et la banque de financement et d’investissement. La second et la troisième sont soumises aux aléas des marchés financiers et du cycle économique. Quant à l’activité de détail, elle dégage une bonne rentabilité grâce à la récurrence du mode de paiement par carte bancaire. Par exemple, lorsque vous faites vos courses à Carrefour et réglez par carte bancaire, ayez à l’esprit que le géant de la distribution paie une commission à sa banque.

D’après une analyse de l’ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution) fin 2018, le résultat brut d’exploitation des banques françaises s’élève à 31,8 milliards d’euros pour l’activité de détail, 9,4 milliards d’euros concernant la gestion d’actifs et 7,5 milliards d’euros pour la banque de financement et d’investissement. Ainsi, vous comprenez que l’activité de détail est un beau trésor de guerre pour le secteur bancaire.

Croyant être à l’abri grâce à une réglementation impossible à percer par la concurrence, les banques risquent de déchanter par la disruption technologique des services. Les fintechs en sont une preuve et font bouger les lignes dans ce secteur oligopolistique. Pour enfoncer le clou, les grands mastodontes du secteur technologique comme Apple, Google, Microsoft, Samsung et bien d’autres travaillent sur des services pour habituer le consommateur à payer avec son smartphone et une technologie permettant de réduire les tentatives de fraude.

Au lieu de se réjouir la fin du cash qui pourrait économiser le coût d’un DAB, les banques devraient plutôt s’inquiéter du destin de la carte bancaire parce que les concurrents qui s’attaquent à ce créneau rentable, sont d’un autre calibre avec des moyens financiers plus conséquents puis font preuve de créativité.

 

Mieux rester à l’écart sur le secteur bancaire, en particulier les banques européennes

Vous trouverez le ton de l’article très pessimiste. Je vous l’accorde par mon côté détracteur du secteur bancaire. Si j’étais à votre place, je ne mettrais pas les doigts sur les banques, en particulier celles du Vieux Continent avec des bilans surdimensionnés à la richesse de leurs pays respectifs.

Les banques ont peur de repenser en profondeur leur business model et se contentent de faire quelques ajustements. Leur mode de fonctionnement historique est un handicap pour affronter les nouveaux défis technologiques. Par exemple, la blockchain est sur le point de mettre à mal leurs activités d’intermédiation. Même si elles ont conscience de cette nouvelle donne, la compétition risque de s’accélérer à vitesse grand V.

Ceci dit, je ne vois pas toujours rouge et noir. Il existe des entreprises du secteur qui exercent des activités honorables comme Invesco, Charles Schwab ou Lazard sans mettre en jeu les comptes courants des ménages. D’ailleurs, je possède Lazard dans mon portefeuille Buy & Hold par son effet kiss cool sur son dividende.

À part faire des coups à court terme, restez à l’écart du secteur bancaire fait sens sur le long terme au regard des fondamentaux. Les investisseurs avisés savent pertinemment que l’adaptation du business model du secteur bancaire prendra beaucoup de temps. Manque de peau, les banques sont encore plus too big to fail après la crise des subprimes en raison du poids des produits dérivés et du shadow banking.