À quoi sert les rachats d’actions ? Avantages et Mises en garde !

opération rachats actions

Les rachats d’actions ont été souvent un sujet polémique parmi la communauté financière. Certains investisseurs prétendent que c’est du gaspillage d’argent, mais d’autres pensent qu’ils ont du bon goût pour les actionnaires.

En 2017, les entreprises du S&P 500 ont dépensé 519,4 milliards de dollars en rachats d’actions contre 536,38 milliards de dollars en 2016. Depuis 2009, cette frénésie surfe sur une tendance haussière. En 2018, ils ont atteint un record grâce à la réforme fiscale adoptée par l’oncle Donald. Naturellement, les investisseurs qui possèdent un portefeuille composé majoritairement d’actions américaines en profitent pleinement.

Les investisseurs qui s’en plaignent, voient une manœuvre comptable pour créer une illusion de prospérité. Ils estiment également que les rachats d’actions est le signe que les entreprises n’investissent pas assez pour les années à venir, donc un frein à l’économie réelle.

Pour tout vous dire, j’éviterais de rentrer dans un débat idéologique. Dans cet article, je vais exposer mon point de vue – à savoir que les rachats d’actions possèdent intrinsèquement des aspects positifs, négatifs et neutres.

 

C’est quoi les rachats d’actions ?

Les rachats d’actions est une opération financière lancée par l’entreprise qui consiste à racheter directement ses propres actions sur les marchés financiers. Le nombre d’actions en circulation diminue mécaniquement. Ce qui permet de créer un effet de richesse pour les actionnaires. Les entreprises qui ont recours à cette ingénierie financière, le font parce qu’elles disposent d’une trésorerie importante.

Nous avons tendance à oublier que les rachats d’actions sont avant tout une des décisions d’allocation du capital que peuvent déployer les dirigeants. Parmi les autres, il y a les dépenses d’investissement (CAPEX), les acquisitions pour la croissance externe

Généralement, les entreprises privilégient une combinaison d’entre elles, car il n’est pas nécessaire de se concentrer sur une seule façon d’utiliser le cash flow généré par l’entreprise. Aux États-Unis, le dividende et les rachats d’actions sont la norme. En Europe, les entreprises sont plus généreuses sur les dividendes.

 

Les avantages des rachats d’actions

En réduisant le nombre d’actions en circulation, vous bénéficiez d’un levier multiplication sur le cours de Bourse et sur le bilan financier de l’entreprise. Cela se traduit par :

  • Une augmentation immédiate du bénéfice net par action (BPA),
  • Une diminution ou maintien du PER (Price Earnings Ratio) pour le rendre le cours de l’action attractif au yeux des investisseurs,
  • Une amélioration de la rentabilité financière sous certaines conditions,
  • Un soutien à la hausse du cours de l’action,
  • Une augmentation de la valeur économique ajoutée (EVA: Economic Value Added).

 

Les autres motivations aux rachats d’actions

Les rachats d’actions ne résument pas à l’aspect financier. Il existe d’autres motivations propres à l’entreprise dont peu d’investisseurs y pensent.

Nous avons tendance à oublier qu’ils constituent un excellent moyen de fidéliser les actionnaires et sont psychologiquement bien perçus par les marchés financiers.

La seconde motivation pourrait venir de la pression des actionnaires majoritaires qui incitent l’entreprise à recourir aux rachats d’actions pour obtenir rapidement une retour sur investissement.

La troisième motivation serait de nature à compenser une augmentation de capital.

La quatrième motivation de racheter des actions suppose que les dirigeants estiment que le cours de l’action est sous-valorisé par rapport aux fondamentaux actuels de l’entreprise. Encore faut-il que ça soit pleinement justifié ?

Enfin, racheter des titres est un moyen de contrer défensivement une possible OPA amicale ou hostile. En diminuant le nombre d’actions en circulation, cela permet de verrouiller le capital de l’entreprise et conforter leurs principaux actionnaires. L’indépendance financière a malheureusement un prix.

 

Les arguments contre les rachats d’actions et alors ?

Les investisseurs qui les critiquent, prétextent des arguments : pas de cash supplémentaire, enrichir les dirigeants, le manque d’investissement, mener vers un mauvais bilan financier. Regardons ça de plus près.

Les rachats d’actions ne donnent pas de cash

À première vue, vous pouvez le penser. Mais des investisseurs intelligents peuvent tirer profit en vendant une partie de leurs titres tout en maintenant leur participation initiale. Ainsi, ils créent un soi-disant dividende en convertissant une partie de leur plus-value grâce au rachat de l’entreprise en cash.

Les rachats d’actions servent à enrichir les dirigeants

La rémunération des dirigeants d’entreprises cotées est en partie basée sur la performance. Elle est mesurée généralement par le cours de l’action et le bénéfice par action. Ces deux paramètres augmentent si l’entreprise rachète des titres, toutes choses égales par ailleurs.

Des mauvaises langues estiment que cela permet aux dirigeants d’obtenir des bonus supplémentaires comme les stock options. Si c’était la motivation principale des dirigeants pour s’engager dans cette opération financière, autant dire qu’ils ne soucient pas de l’avenir de l’entreprise. Au contraire, s’ils le font, c’est qu’il y a un intérêt commun avec les actionnaires, en particulier si la part des insiders est relativement importante.

L’exemple évident est Berkshire Hathaway. Warren Buffett possède des parts importantes dans le capital. Il est incité à prendre des décisions mettant l’accent sur la création de valeur à long terme pour les actionnaires.

Les rachats d’actions n’incitent pas à investir

Investir dans un projet ambitieux, c’est génial. Mais avez-vous pensé à sa rentabilité ? Si ça ne marche pas, c’est comme jeter l’argent par les fenêtres. Les entreprises cotées n’ont pas envie de se faire tirer les oreilles par leurs actionnaires. En cas d’opportunités de croissance externe, les entreprises réfléchiront à deux fois sur les synergies potentiels.

Des entreprises comme Coca Cola, Pepsico, Nestlé, Air Liquide n’ont plus besoin de réinvestir autant qu’auparavant. Elles ont profité des progrès technologiques pour gagner en gain de productivité. Ce qui permet d’accroître leur cash flow disponible.

Faut-il s’inquiéter du manque d’investissement chez les entreprises cotées ? La réponse est non parce que la croissance organique offre le meilleur ratio risque/rendement pour les dirigeants. Une partie du cash flow disponible non nécessaire au réinvestissement sera utilisée pour des rachats d’actions.

Les rachats d’actions conduirait à dégrader le bilan financier

Avec des taux d’intérêt proche de zéro, la tentation est énorme pour racheter des titres à crédit. De nombreuses entreprises se sont endettées même chez les grandes. Vous vous dites que c’est une décision suicidaire qui conduirait à une issue fatale.

Si le bilan financier de l’entreprise est solide et s’endetter rapporte plus qu’il ne coûte, pourquoi en faire tout un plat. Les rachats de parts ne sont pas dangereux. Les investisseurs n’ont rien à craindre.

En revanche, une entreprise endettée qui abuse de cette ingénierie financière en roulant constamment sa dette, serait confrontée à des problèmes graves si une crise économique émerge.

 

Les mises en garde des rachats d’actions

Les rachats d’actions peuvent apporter leur lot de mauvaises surprises. Vous ferez mieux de ne pas les négliger à l’avenir :

  • Après l’opération de rachat, le capital diminue mais les dettes ne sont pas impactées. Cela signifie que l’effet de levier (dettes/capitaux propres) augmente.
  • Une entreprise ayant trop souvent recours à cette ingénierie financière, démontrerait son incapacité à trouver des relais de croissance pour sa survie dans les prochaines décennies. Un moment donné, M. le Marché va se poser des questions puis ce sera au tour des actionnaires.
  • Une baisse de la rentabilité financière si les entreprises conservent leur trésorerie placée dans des fonds monétaires qui ne rapportent pratiquement rien et se financent à 100 % en fonds propres.

 

Tout n’est pas à jeter !

Les rachats d’actions sont une ingénierie financière qui n’est pas à mettre à la cave. Elle profite à court, moyen et long terme aux actionnaires. Pourquoi vous en priver même si vous ne l’apercevrez pas concrètement sur l’évolution du cours de l’action.

L’Oracle d’Omaha, Warren Buffett les apprécie à condition que les fondamentaux de l’entreprise soient solides. Cependant, son mécanisme peut être destructeur si les dirigeants se lancent à corps perdu pour soutenir à tout prix le cours de l’action. S’écarte d’une politique stratégique de long terme au profit du court-termisme serait mal perçu par les actionnaires. Tôt ou tard, la sentence arrivera avec une belle patate chaude.

Sans personne ne pense, les rachats d’actions ont aussi pour vocation de préserver des pépites nationales et internationales contre des velléités agressives de concurrents qui veulent augmenter leurs parts de marché. Ils permettent également d’instaurer un climat de confiance vis-à-vis des actionnaires en alignant les intérêts sur la même ligne de crête.

Pour les investisseurs particuliers comme vous et moi, tout dépend de notre sensibilité. Il y a un camp qui sera plus attiré par la plus-value immédiate. Un autre voudra maintenir la stabilité dans la direction de l’entreprise.